Pourquoi apprendre le chinois au collège ?
Apprendre le chinois en classe collège, en effet cela peut paraître décaler lorsque l’on connait les difficultés de certains élèves à gérer le français : sa grammaire, son orthographe, son vocabulaire, sa conjugaison.
Le chinois par la complexité de son écriture, la subtilité de ses différents sons (les quatre tonalités), la précision de son graphisme (calligraphie) et l’ouverture à une autre civilisation fait appel à l’utilisation de plusieurs gestes mentaux.
Les travaux d’Antoine de la Garanderie sur les cinq gestes mentaux montrent que l’apprentissage du chinois permet l’application et le développement d’au moins trois des cinq gestes mentaux à un âge où il est important de les développer. L’apprentissage du chinois peut être une voie d’accès pour les développer.
Une évocation nécessaire :
En effet la difficulté annoncée de cet apprentissage oblige à créer les conditions d’une évocation réussie.
L’évocation étant un acte mental nécessaire il faut des conditions précises pour que se réalise cet apprentissage. Comme l’écrit Chantal Evano dans son livre « la gestion mentale, un autre regard, une autre écoute en pédagogie » ayant recours à deux peintres chinois :
« Le peintre chinois ne peint jamais directement d’après la réalité présente. Il travaille de mémoire, après s’être exercé de manière très intense à la perception des objets qu’il contemple et dont il enregistre l’image dans un grand état de concentration. Lorsqu’il saisit son pinceau, il se recueille à nouveau pour se préparer à l’apparition de l’image mentale comme si on attendait un visiteur de haut rang » (Kuo Hsi)
« Le peintre doit intensifier son pouvoir de perception et s’approprier complètement le bambou ou la fleur imaginaire. A ce moment, seulement il pourra s’emparer de son pinceau et tracer la forme qui a surgi devant son œil mental » (Su Shih)
Ces écrits des deux peintres chinois montrent que le passage par l’évocation est obligatoire.
Cette évocation rencontre avec l’écriture chinoise des difficultés devant faire appel à plusieurs gestes mentaux.
La nécessité de faire attention :
En effet l’attention est un geste mental important à développer pour apprendre le chinois. Les caractères chinois étant « nouveaux » et de natures différentes, l’attention est nécessaire afin de pouvoir mettre en tête toutes les spécificités voir les difficultés de ces signes. L’originalité et la nouveauté interpellent et invitent à susciter le geste d’attention.
L’obligation de mémoriser :
Une fois l’attention captivée, il faut développer la mémorisation afin de se souvenir des caractères et des mots. Pour retenir les mots, la calligraphie devra être développée, l’aspect kinestésique étant une des possibilités pour travailler la mémoire des formes et du geste afin de fixer l’écriture des caractères et des mots. Mais aussi une écoute attentive devra par une audition appliquée être mise en œuvre pour apprendre la langue.
Le travail de mémorisation est un moment à consacrer à l’étude de toutes nouvelles notions, tant pour la découverte d’un nouveau caractère qu’au niveau de l’appropriation d’un nouveau mot.
Pour s’assurer que l’acte de mémorisation est bien effectué, il faut vérifier que le caractère est bien présent et existe sans faute et que nous l’avons bien approprié.
Développer l’imagination :
Enfin le passage des caractères du « chinois ancien » au « chinois moderne » fait appel à l’imagination. Cet appel à l’imagination montre en plus des autres gestes déjà nommés le recours au développement d’un geste mental offrant un univers ouvert et original.
L’apprentissage du chinois en classe collège fait donc appel à la nécessité de développer une bonne et précise évocation, fait travailler l’attention, la mémorisation de l’élève et le plonge dans une imagination guidée.
En cela l’apprentissage de telle langue est en soit un exercice de travail développant et structurant les potentiels d’un collégien.
Enfin pour des enfants intellectuellement précoces, cette recherche de la difficulté d’appréhender une langue spécifique permet de canaliser un trop plein d’ énergie en offrant une difficulté abordable sous forme d’un challenge toujours apprécié des jeunes élèves.
Donc au-delà d’une volonté de vouloir apprendre le chinois pour parler cette langue (1 milliard trois cent millions de personnes le font déjà !), les bienfaits et les qualités nécessaires pour son étude permettront de développer l’attention de l’enfant, la mémorisation de l’élève et l’imagination de l’apprenant. Rien pour ses raisons l’apprentissage de cette langue en classe collège est une initiative et un enjeu éducatif à ne pas négliger.
Bertrand Philippe, Chef d’établissement, cours privé Francois et Jacinthe Fatima